Les habits

Publié le par tourmentout

Aujourd'hui, des habits marchent dans les rues. Ils sont vides, aucun être humain ne les occupe. Les habits sont organisés, des pull-overs planent au-dessus des pantalons, qui cheminent en calquant leur pas sur les souliers, imprimant fièrement leur cadence sur les pavés. Quelques jupes froufroutent de manière inconséquente au-dessus d'escarpins noirs mouchetés de blanc, un polo vert se déhanche nonchalement au-dessus d'un pantalon de toile relax. Les habits se croisent parfois, et s'arrêtent en face d'autres habits qu'ils croisent, comme ça, sans raison, un peu comme si c'était des personnes et qu'ils discutaient. Certains s'arrêtent en face des vitrines où il y a d'autres habits. Mais ces habits-là sont immobiles, accrochés, exposés. Ils ont l'air plus beau que les autres, ceux qui marchent dans la rue. Puis, après les avoir suffisament admirés, ils repartent, résignés, conscients qu'ils ne seront jamais aussi beaux que ceux qui peuplent les vitrines. Des habits prennent le café, mais lorsqu'ils le versent, le café tombe dans le col du pull. Ce dernier fait mine de ne pas s'en apercevoir, bien qu'il soit tâché d'un liquide brulant. Beaucoup d'habits se salissent de cette manière, également en faisant mine de manger un sandwich ou mettre du rouge à lèvre. Mais ce n'est pas grave car ils passent parfois au pressing, se jettent dans la machine et en ressortent tous propres, quoi qu'un peu mouillés. Ils s'empressent alors de retourner se verser du café brûlant dessus.

Publié dans Littérature

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